Cette 25e livraison de la Série « Albert Camus » prend la suite du numéro 5 (1972) consacré à “Albert Camus : Journalisme et politique. L’entrée dans l’histoire (1938-1940)” et du numéro 22 (2009) : “Albert Camus et l’histoire”. La Seconde Guerre mondiale, ses violences, ses souffrances, ses révoltes contre l’ordre jusque là admis obligent Camus, comme nombre de ses contemporains, à reprendre, approfondir, voire contester des choix qui semblaient assurés dans la France de la IIIe République. Ainsi, les années d’effervescence de l’après-guerre voient le jeune Camus de l’Algérie coloniale faire place à l’écrivain reconnu dont la sensibilité d’artiste et de citoyen trouve une expression non pas définitive mais s’ouvrant vers de nouveaux chemins qu’il empruntera la décennie suivante. Les auteurs des contributions réunies ici ont, chacun dans le domaine qui leur est propre, tâché d’en décrire et analyser plusieurs facettes autour de deux grands pôles : d’une part, l’engagement de l’intellectuel et du journaliste, d’autre part le travail du créateur.
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Analyser les rencontres qu’un écrivain est amené à faire au long de sa vie est un défi que les contributeurs de cette 24e livraison de la Série Camus ont voulu relever. Ils ont tenté de mettre à jour certaines lignes de fond de l’œuvre créatrice et des convictions éthiques et politiques de Camus en explorant l’espace mystérieux où s’imbriquent biographie et création. Cela les a conduits à l’école où le jeune Camus rencontre les « grands » de la littérature et leurs passeurs que seront ses maîtres, puis au théâtre, lieu par excellence de l’action collective et solidaire, enfin aux violences et aux utopies politiques du xxe siècle qui l’engagent dans un dialogue fécond – parfois tumultueux jusqu’à la rupture – avec ses contemporains.
Sommaire
Avant-propos par Philippe VANNEY
1. La Rencontre avec Grenier, par Toby GARFITT 2. « Ulysse avec le regard de Camus » : Camus et le mythe odysséen, par Chia-Hua HSU 3. Le Coq, la Pierre et l’Ingénieur : « La Pierre qui pousse » ou Camus au pays de La Fontaine, par Marie-Sophie AMSTRONG |
Ce volume se divise en deux sections. Dirigée par Raymond Gay-Crosier, la première réunit huit contributions livrées au colloque international « Camus et l’Histoire », organisé par Carol Murphy en 2008 à l’Université de Floride. Dans la deuxième section, coordonnée par Philippe Vanney, trois articles prolongent la réflexion sur les rapports complexes entre Camus et l’Histoire, puis cinq articles privilégient tantôt un thème (l’exécution capitale, la nuit), tantôt une comparaison (avec Beckett), tantôt des œuvres précises (« Le Renégat », trois pièces de théâtre). Enfin, la provenance des seize contributeurs se remarque par son caractère nettement international (France, Belgique, Allemagne, Royaume-Uni, Canada, États-Unis et surtout Japon).
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avant-propos, par Raymond Gay-Crosier
I. CAMUS ET L’HISTOIRE 1. Camus et la dimension du quotidien, par Colin Davis. |
Atypique, ce numéro est majoritairement constitué d’un « Grand carnet critique ». Celui-ci s’organise autour de cinq axes : philosophique ; thématique ; politique, culturel et historique ; esthétique ; comparatif. D’éminents critiques y recensent trente-cinq livres sur Camus, sur la cinquantaine parue entre 2000 et 2005. Auparavant, l’avant-propos déconstruit, sinon relativise « Les purgatoires de Camus », selon son titre ironique. Suit un texte qui invite, devant les bouleversements actuels, à un réexamen de la réflexion de Camus sur l’histoire. Puis la section « Études » présente trois articles : respectivement sur le silence dans Le Premier Homme, sur Caligula et la modernité dramaturgique, sur les liens entre Camus et Don Quichotte.
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les purgatoires de Camus, par Raymond Gay-Crosier
I. CAMUS DEVANT L'HISTOIRE 1. La Réflexion historique chez Albert Camus, par Madalina Grigore-Muresan. |
Théâtre de l’impossible ou impossible théâtre ? Telle est la question posée par ce volume. À la fois théâtre d’idées et théâtre littéraire, il est empreint de la philosophie de Camus. Toutes ses pièces, à divers degrés, montrent l’impossibilité d’aimer. Caligula dresse d’abord un portrait en négatif de l’artiste confronté au « Rien », puis, par le biais d’une pièce à l’intérieur de la pièce s’interroge sur la notion d’art. La “tragi-comédie” Les Justes met en évidence le jeu dans le jeu.
Une liste de manuscrits et d’inédits théâtraux, détenus par Francine Camus, et des extraits d’une lettre d’Edmond Charlot à Peter Dunwoodie sur les lectures de l’écrivain avant la guerre complètent ce numéro que clôt un abondant carnet critique. |
Ce volume se divise en quatre parties. La première, composée de six articles, est consacrée au seul recueil de nouvelles que Camus ait écrit. Les deux premières études s’intéressent à L’Exil et le Royaume en tant que recueil. Peter Cryle en montre l’unité dans la diversité, Owen J. Miller la cohérence. Les quatre suivantes traitent de deux nouvelles : « Jonas » et « Le Renégat ».
La deuxième partie se compose de deux études : Jean Gassin s’intéresse au sadisme chez Camus et Myrna Magnan-Shardt voit dans La Chute l’influence de Dostoïevski et d’un genre particulier de récit russe, le skaz. Un riche carnet critique constitue la troisième partie ; le carnet bibliographique de 1971 suivi de compléments 1967-1970 par Peter C. Hoy clôt ce volume. |
Dans le cadre d’une longue recherche entreprise sur les articles écrits par Camus entre 1938 et 1940 dans Alger républicain et Soir républicain, Jacqueline Lévi-Valensi et André Abbou éclairent le contexte et les grandes lignes de son combat contre l’injustice politique et sociale caractéristique de l’Algérie de l’époque, ainsi que son engagement culturel en tant qu’homme de théâtre et critique littéraire. Ces études sont judicieusement complétées par la publication de « The Human Crisis », traduction anglaise d’une conférence donnée aux États-Unis en 1946 sur les conséquences politiques et morales de la guerre.
En plus des habituels carnets critiques et bibliographiques, une nouvelle rubrique d’échanges entre chercheurs fait son apparition. |
Que ce soit dans la partie consacrée aux monographies ou dans celle réservée aux critiques et à l’analyse bibliographique, ce numéro 4 fait une large place aux études comparatives. La première partie est à la recherche des sources et influences du côté de Chestov, Dostoïevski, Kafka, mais aussi de Giono et Hemingway, ainsi que de la Bible. Les questions de méthodologie des études comparatives sont abordées dans l’article rédigé par Owen. J. Miller sur Camus et Hemingway. La plume de l’écrivain y est aussi présente avec la publication d’un texte inédit, « Balthus », préface au catalogue d’une exposition consacrée au peintre à la Galerie Pierre Matisse de New York en 1949. Ce texte n’était connu jusqu’alors que dans sa traduction en anglais.
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« Comment aborder une œuvre si complexe sans trahir sa complexité? » Tel est le défi lancé par B. T. Fitch que les études rassemblées ici sur La Chute et sur l’image du miroir chez Camus relèvent en une étonnante convergence. L’oralité du monde du jugement se déploie en un espace théâtral où le monologue de l’acteur devient dialogue avec le lecteur. Derrière le masque de Clamence, le linguiste dévoile des tentatives de réconciliation avec les autres et lui-même. La Chute est moins une confession qu’une expérience de la comédie humaine et de ses ambiguïtés.
En plus de nombreuses recensions et d’une riche bibliographie, on pourra lire un entretien avec E. Charlot, libraire-éditeur, chez qui le jeune Camus et ses amis avaient leurs quartiers. |
Fidèle à l’idéal affiché lors de la création de la Série Camus, plus de la moitié de cette livraison consiste en un panorama de la recherche : publication de documents, comptes rendus approfondis d’ouvrages sur les aspects philosophiques, éthiques et politiques de l’œuvre, ainsi que sur L’Étranger et le théâtre.
Le titre du volume se justifie par trois études : l’une sur une approche stylistique et grammaticale du texte camusien, une autre sur une analyse linguistique du discours de L’Étranger, tandis que la dernière questionne la confiance de Camus à l’égard des mots. Il s’agit encore de langage, théâtral ou cinématographique, avec une note sur l’influence d’Antonin Artaud, et une autre à propos de l’adaptation de L’Étranger par Visconti. |
Le numéro inaugural de la Série Camus réunit les premiers grands piliers de la critique camusienne. Relire L’Étranger avec les yeux d’un lecteur à la fois de La Chute et du Rouge et le Noir incite à voir en Meursault un héros romantique à l’individualisme exacerbé où se mêlent le refus de la société et le désir de renouer avec les autres. Selon un autre article, l’emploi du discours indirect libre dans le roman crée une ambiguïté qui participe d’une esthétique de la distanciation. Suivent deux études, l’une sur la place de l’Espagne dans la vie et l’œuvre de Camus, l’autre sur ce qu’on pourrait appeler son anti-athéisme. La partie biographique présente la transcription des réponses de Camus à un long questionnaire sur sa jeunesse.
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